• "Que ma joie demeure" - extraits du roman de Jean GIONO

     

    Je viens de finir ce roman tout à fait atypique, qui est une véritable ode à la nature, décrite et captée dans son essence profonde. Voici une sélection de passages philosophiques, qui révèlent aussi toute la poésie de cet auteur.

     

    P207 - Besoin de joie

     

    "La vérité, […] c'est que nous avons besoin de joie. […] Et c'est au fond la seule chose qu'on cherche et pour laquelle on travaille."

     

     

     

    p214 - Semer la joie

     

    "Semer la joie, l'enraciner et faire qu'elle soit comme un pré gras avec des millions de racines dans la terre et des millions de feuilles dans l'air."

     

     

     

    P266 - Les joies du monde

     

    Une seule joie, et le monde vaut encore la peine. […] Une seule joie et nous avons patience. […] Les joies du monde sont notre seule nourriture. La dernière petite goutte nous fait encore vivre. […] Tu sais que j'ai besoin de joies. Tu sais que personne ne peut vivre sans joie. La vie c'est la joie. […] [Ma joie] est basée sur la simplicité, sur la pureté, sur l'ordinaire du monde."

     

     

     

    p426 – La joie tous les jours

     

    "[…] la joie et la paix. Il faudrait que la joie soit paisible. Il faudrait que la joie soit une chose habituelle et tout à fait paisible, et tranquille, et non pas batailleuse et et passionnée. Car moi je ne dis pas que c'est de la joie quand on rit ou quand on chante, ou même quand le plaisir qu'on a vous dépasse le corps. Je dis qu'on est dans la joie quand tous les gestes habituels sont des gestes de joie, quand c'est une joie de travailler pour sa nourriture. Quand on est dans une nature qu'on apprécie et qu'on aime, quand chaque jour, à tous les moments, à toutes les minutes tout est facile et paisible. Quand tout ce qu'on désire est là."

     

     

    "Que ma joie demeure" - extraits du roman de Jean GIONO

     

    p494 - L'espérance

     

    "Il ne faut pas perdre confiance. Il faut se souvenir que la confiance c'est déjà de la joie. L'espérance que ce sera tout à l'heure, l'espérance que ça sera demain que ça va arriver, que c'est là, que ça nous touche, que ça attend, que ça gonfle, que ça va crever tout d'un coup, que ça va couler dans notre bouche, que ça va nous faire boire, qu'on n'aura plus soif, qu'on n'aura plus mal, qu'on va aimer."

     

     

     

     

     

    P39 – La jeunesse

     

    "La jeunesse, dit l'homme, c'est la joie. Et, la jeunesse, ce n'est ni la force ni la souplesse [...] : c'est la passion pour l'inutile. Inutile, […] qu'ils disent !""

     

     

     

    p453 – Le travail bien fait

     

    Bobi observe un homme en train de faucher de manière extrêmement habile.

     

    "C'était trop beau. Un travail qu'on ne fait plus. Il faut du temps pour faire ça […]. Il faut avoir [...] du temps à perdre pour faucher comme ça. […] Ou bien il faut être très pauvre, avoir besoin de tout [le faucheur coupe les tiges à ras pour ne pas perdre un centimètre de paille] Ou bien alors, il faut être très riche et faire ça pour son plaisir, pour sa joie, pour bien faire ce qu'on fait. Voilà que dans ces choses là, riche ou pauvre c'est pareil, et pauvreté c'est richesse."

     

     

     

    p201 - Donner

     

    "Le monde se trompe […]. Vous croyez que c'est ce que vous gardez qui vos fait riche. On vous l'a dit. Moi je vous dis que c'est ce que vous donnez qui vous fait riche."

     

     

     

    p189 - La vraie danse

     

    "[ ..] il y avait le tambour du sang, le grondement du sang. Il tapait sur un sombre tambour dans les hommes et dans les femmes. A chaque coup, ça tapait comme au creux de la poitrine. On se sentait lié à cette cadence. C'était comme le volant des batteuses qui battent le blé. C'était comme le fléau qui bat le blé, vole, bat le blé, vole. C'était comme la peine de l'homme qui saute dans la cuve. C'était comme le galop régulier d'un cheval et s'il galope tout le temps comme ça, régulièrement, avec ses gros sabots, il va jusqu'au bout du monde, et après le bout du monde il galopera dans le ciel, et la voûte du ciel sonnera comme la terre sonne maintenant. Toujours, toujours, sans arrêt, parce que le sang ne s'arrête pas de battre, et de fouler et de galoper, et de demander avec son tambour noir d'entrer en danse. Et il appelle, et on n'ose pas. Et il appelle, et on ne sait pas s'il faut... Et on a dans tout son corps des désirs, et on souffre. On ne sait pas et on sait. Oui, vaguement on se rend compte que ce serait bien, que la terre serait belle, que ce serait le paradis, le bonheur pour tous et la joie. Sa laisser faire par son sang, se laisser battre, fouler, se laisser emporter au galop de son propre sang jusque dans l'infinie prairie du ciel lisse comme un sable. Et on entendait galoper, galoper, battre et battre, fouler et fouler, le tambour sonner sous la grande paume noire du sang qui le frappe. Mais ce serait la danse, la vraie danse, on obéirait de la vraie obéissance. On ferait ce que le corps désire. Tous ces appels du sang seraient des appels de joie. Tandis que là, on ne sait pas, on ne sait pas s'il faut. On sait qu'il faudrait, mais on ne bouge pas, on est attaché. Et du creux de la poitrine aussi on est attaché, cette musique de danse, et le sang appelle, et on est comme déchiré. Parce que le pauvre corps ne sait plus. Parce que la jeune sang qu'on vient de faire sait. (…] Le sang a raison, somme toute."

     

     

     

    p271 – Mise en commun

     

    "On ne dira plus ni mes arbres, ni mon champ, ni mon blé, ni mon cheval, ni mon avoine, ni ma maison. On dira notre. On fera que la terre soit à l'homme et non plus à Jean, Pierre, Jacques ou Paul. Plus de barrières, plus de haies, plus de talus. Celui qui enfoncera le soc à l'aube s'en ira droit devant lui à travers les aubes et les soirs avant d'arriver au bout de son sillon. Ce sillon ne sera que le commencement d'un autre : Jean à côté de Pierre, Pierre à côté de Jacques, Jacques à côté de Paul, Paul à côté de Jean. Tous ensemble. Chevaux, charrues, jambes, bras, épaules, en avant, tous ensemble, pour tous."

     


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  • Commentaires

    1
    Sergio
    Mardi 1er Novembre 2016 à 14:41

    Merci pour ces extraits d'une écriture incandescente. Giono a su capter la simplicité de la nature dans toute sa splendeur et la restituer de façon magistrale..

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